Je suis toute cette semaine en résidence artistique dans le cadre du festival photo de Montmélian en Savoie (73). J’ai été invité par Christophe Billon, son directeur, à réaliser une carte blanche avec pour seule contrainte, celle du territoire de Montmélian. L’objectif de cette résidence est de produire une série photographique qui sera exposée à partir du 25 juin, dans les rues de la ville de Montmélian, dans le cadre de son festival photo annuel.

Quel luxe d’avoir à la fois une carte blanche et un budget pour travailler sur le thème de mon choix et de la façon dont je l’entends, sans contrainte. 1000 mercis Christophe pour cette opportunité.

J’ai décidé d’orienter mon travail autour de la thématique de la migration et in fine réaliser des portraits de personnes réfugiées. C’est une envie qui me tient à coeur depuis plusieurs années et je suis heureux d’avoir aujourd’hui cette chance de la mettre en œuvre. C’est ma façon de m’engager à la fois en faveur d’une plus grande compréhension de l’autre et contre les préjugés que bien trop érigent comme des frontières. Après tout, la photographie peut servir de nombreux desseins.

Depuis mon travail sur les soeurs hospitalières de Beaune (produit entre 2019 et 2022), quelque chose s’est révélé à moi. Travailler à la chambre et en couleur m’a beaucoup touché. Cela a même changé ma façon d’appréhender la photographie. J’y ai vu là une forme de consécration intérieure, pour son éloge de la lenteur et cette façon de se rapprocher de l’origine du médium, sa source.

Alors pour cette résidence savoyarde, tout s’est imposé à moi. Je travaille à la chambre argentique 4×5 inch. Avec du film noir et blanc. J’ai imaginé ces portraits devant un simple morceau d’étoffe, en lumière naturelle et en intérieur. L’idée est d’avoir des portraits très doux de toutes ces personnes, à l’intérieur d’un dispositif enveloppant. Je prends deux portraits de chacun, deux plans différents, je ne sais pas encore lequel me satisfera le plus, même si je penche pour le plan le plus serré. Ce sera à mesurer une fois les positifs développés.

J’ai choisi un film noir et blanc au grain très fin. J’aurai aimé travailler en couleurs mais dans ce format, le coût est élevé. Et puis le noir et blanc me permet de developper moi-même les films. J’aime avoir la maîtrise de l’ensemble du processus, de l’idée jusqu’à sa mise en œuvre. Les après-midi je photographie au Foyer des Jeunes Travailleurs de Montmélian. Et le matin, je développe mes plans films à la maison. Il me restera à les scanner pour les transmettre au festival. Et bien-sûr de faire les tirages contact, que j’offrirai à chacun(e) des participant(e) de ce projet.

Je ne m’interdis pas à posteriori de coloriser ces portraits. Là aussi, ça fait des années que je tourne autour de ce fantasme, que je sais possible grâce à Jean-Pol Sterck, gourou belge des techniques photographiques créatives. Car je ne veux pas le faire sous photoshop. Trop facile et surtout pas assez artisanal. J’aime le travail dans la matière. C’est aussi pour cela que je travaille en argentique. Car le négatif existe dans la matière, c’est un objet.

Je dois préciser que j’ai été accueilli formidablement par Julien Gabet, directeur du FJT et Dominique Vuillerot, responsable du CADA – Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile de Montmélian. Ils m’ont ouvert tous deux les portes de leur organisation et m’ont permis de faire ma résidence dans des conditions optimales. Qu’ils soient remercié ici tous les deux, merci Julien, merci Dominique et merci également Pauline, qui travaille au FJT.

J’aurai aimé avoir plus de temps et surtout de ne pas être blessé au pied pour poursuivre ce travail plus en profondeur. Mais c’est déjà une aventure passionnante. Dans quelques jours, je vous présenterai ce travail finalisé, son titre, son texte d’accompagnement et tous ces portraits de ces personnes qui m’ont accordé la confiance nécessaire afin que je puisse les regarder puis les photographier, dans un acte nécessaire de partage et de transmission. Que chacun(e) soient remercié(e) ici.

Voici quelques photos du cadre et du process de travail :